Janvier 2023 : Cet ouvrage vient d'être réédité, en tirage à la demande. Il s'agit d'une nouvelle édition entièrement recomposée, identique à l'édition originale, et non d'un fac-similé de mauvaise qualité. L'ouvrage de 370 pages est disponible en grand format (18x25cm) en version brochée (couverture souple), en version reliée (couverture rigide), ou bien en 4 petits fascicules à prix étudié, reprenant chacun une des quatre grandes parties de l'ouvrage). Une version Kindle est également disponible.

L'objectif de cette réédition était uniquement de proposer une lecture plus facile et agréable, et pour cela, l'ouvrage a entièrement été remis en page. Pour aider le lecteur à actualiser ses connaissances, une bibliographie mise à jour a été ajouté.

Châteaubriant, baronnie, ville et paroisse



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Chapitre VIII (suite)




29 avril 1814. - De son côté, M. Connon, maire de Châteaubriant, s'exprimait ainsi dans une proclamation lue et affichée dans toute la ville :


« Mes concitoyens,


» Les heureux changements survenus dans le gouvernement, le rappel de Louis XVIII sur le trône de ses pères et de nos rois, le retour dans leurs foyers des gardes nationales, l'abolition d'une conscription tyrannique qui était l'arrêt de mort du jeune homme qui y était soumis, le désespoir, souvent la ruine de ses parents, le licenciement d'un dixième de l'armée, tels sont les bienfaits que nous ont apportés, en échange de toutes les vexations, les puissances tutélaires qui nous ont rendu notre légitime souverain.

» Notre situation s'améliora : sans cesse, toutes les pensées de Sa Majesté tendent à cet unique but. Mais ne croyons pas cependant qu'il vient s'asseoir sur un trône semé de roses. Que de plaies à cicatriser ! Que de maux à réparer ! La guerre est un torrent affreux dont le débordement est terrible. Quels ravages n'a-t-elle pas faits dans plusieurs de nos plus belles provinces ! Pillées alternativement par les étrangers et les Français, épuisés de réquisitions, dépourvus de tout, combien leur sort est à plaindre ! Sa Majesté a l'intention de sécher leurs larmes et de réparer une partie de leurs désastres ; mais pour y parvenir, elle a besoin du concours de ses sujets. Ils doivent l'aider de tous leurs moyens ; ils y sont autant portés par inclination que par devoir. Les impôts seront revus et diminués par la suite ; mais on doit s'empresser d'acquitter les termes échus. Il est dû en ce moment cinq douzièmes ; qu'ils soient donc payés de suite ; Que les propriétaires aisés anticipent le versement de leurs contributions ; que l'ouvrier et l'artisan portent ce qu'ils pourront distraire des besoins de leurs familles. Si la classe ouvrière portait tous les mois 12 ou 17 sous au précepteur, elle ne s'en apercevrait pas et s'acquitterait de sa taxe. Tel ne peut payer qui payera aisément cette somme en plusieurs termes.

» Sa Majesté veut faire des changements importants dans la perception des droits réunis ; le mode de perception, l'arbitraire, et le taux révoltent avec raison les Français; mais il faut que le roi ait prononcé dans son Conseil. Il le fera dans le courant de cette année ; nous devons donc attendre ses ordres. Jusqu'à ce moment, la perception est la même que par le passé, et on doit être exact à acquitter les droits qui sont dus. Encore un peu de patience ! Combien il est aisé de supporter un mal dont la fin est prochaine et prévue ! Attendons donc les réformes, mais ne les prévenons pas. Soyons toujours unis, toujours Français : Vive la paix ! Vive le Roi ! »

Le matin du même jour, le maire, au sein de son Conseil, s'était exprimé en termes tellement énergiques à l'endroit du gouvernement déchu, qu'il nous est impossible de les reproduire..... Sur sa proposition, il fut adopté qu'on enverrait au roi une adresse et qu'on députerait trois des plus notables citoyens pour la lui porter.

L'adresse, rédigée par les soins de MM. Guibourg, Delaunay, Gautron et Lefoux, était ainsi conçue :


« Sire,


» Des enfants désolés et malheureux retrouvent un bon père ; l'allégresse qu'ils éprouvent de son retour efface les vestiges mêmes de ces temps désastreux qui leur ont coût tant de larmes et de sang. Du moment où vous avez touché le sol de la France, berceau de votre auguste famille, les acclamations et les transports de joie d'un peuple sensible ont dû vous persuader que vous régnerez sur les coeurs. Sire ! quel beau jour pour la nation française ! L'anarchie disparaît; l'ordre et la justice vont lui succéder ; un monarque dont la renommée publie la bonté, les lumières et les vertus, va donner un nouvel éclat à la morale et à la religion, et faire refleurir les arts et le commerce. Nos descendants, jaloux de notre bonheur, béniront votre mémoire, en regrettant de n'avoir pas vécu sous votre règne, qui accroîtra l'ornement et la gloire de la dynastie des Bourbons, et partagera nos sentiments de fidélité, d'amour et de respect. »

Une députation se forma, composée de MM. Connesson, maire ; Thuillier, conseiller municipal; Achille Le Pays, capitaine de la garde nationale mobile, auxquels furent adjoints MM. Brossays, fils d'un ancien maire ; de la Pilorgerie, qui n'accepta pas, et de Virel, absent.

Le 27 mai, la députation fut introduite dans le salon de la Paix. Le roi était assis dans un fauteuil, en uniforme bleu, avec épaulettes de colonel, décoré de ses ordres, celui de la Jarretière à la jambe gauche, la tête découverte.

M. Connesson, président de la députation, remit au roi l'adresse du conseil municipal, en lui faisant entendre des paroles empreintes d'une telle vivacité sur la personne de Bonaparte que nous nous abstiendrons de les reproduire.


Le roi répondit :


« J'agrée les sentiments que vous venez de m'exprimer. Votre courage, dans des circonstances aussi difficiles, m'est un sûr garant de votre fidélité. Votre ville peut compter sur ma bienveillance et ma protection. »

M. le Président de la députation ayant demandé à Sa Majesté la faveur pour ceux qui l'accompagnaient de porter la décoration du Lys, Sa Majesté a répondu: Je vous l'accorde avec bien du plaisir.

La même députation eut encore l'honneur d'être présentée à Mme la duchesse d'Angoulême, à laquelle elle adressa les paroles suivantes :


« Madame,


» Après avoir déposé aux pieds de Sa Majesté le juste tribut d'amour et de fidélité des habitants de la ville de Châteaubriant, il est bien doux pour nous d'être admis à vous offrir l'hommage de notre respect.

» Pendant vos longues infortunes, nos coeurs flétris par la douleur n'avaient jamais cessé de vous suivre. Vos vertus, dans l'adversité, les ont remplis d'admiration la plus vive, et votre heureux retour, présage de notre bonheur, comble nos voeux les plus ardents et nos désirs les plus chers. »


Son Altesse royale a répondu :


« Mes maux, il est vrai, ont été bien grands ! Dieu seul et l'attachement de beaucoup de Français pouvaient y apporter un adoucissement réel. Les sentiments que vous m'exprimez effacent tous ceux qui me sont personnels et il sont bien chers à mon coeur. »

Monseigneur le duc d'Angoulême permit encore à tous les officiers de la garde urbaine de porter la décoration du Lys (1).

La joie universelle ne fut pas de longue durée, et le retour de l'île d'Elbe vint de nouveau renouveler toutes les craintes des vrais serviteurs de la royauté. Dans cette épreuve délicate, Châteaubriant demeura inébranlable dans ses sentiments et dans sa fidélité. Nous relevons ce passage d'une adresse envoyée au roi, à la date du 11 mars 1815 :

« Nous espérons qu'aucuns moyens extraordinaires ne seront nécessaires pour anéantir le&..; mais, Sire, si Votre Majesté faisait appel à ses sujets, elle peut compter sur l'entier dévouement de ce pays. A votre voix, notre population toute entière marchera contre lui, et environnera votre personne sacré du triple rempart de son amour, de sa fortune et de sa vie. »







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