Janvier 2023 : Cet ouvrage vient d'être réédité, en tirage à la demande. Il s'agit d'une nouvelle édition entièrement recomposée, identique à l'édition originale, et non d'un fac-similé de mauvaise qualité. L'ouvrage de 370 pages est disponible en grand format (18x25cm) en version brochée (couverture souple), en version reliée (couverture rigide), ou bien en 4 petits fascicules à prix étudié, reprenant chacun une des quatre grandes parties de l'ouvrage). Une version Kindle est également disponible.
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Ce couvent fut fondé en 1252, par Geffroy, 4me baron de Châteaubriant, à son retour de Barbarie, où il fut fait prisonnier à la journée de la Massoure, avec le roi Saint-Louys, Pierre de Dreux, auparavant duc de Bretagne, et toute larmée chrestienne, par les Sarrazins, au mois de février, en 1250, et qui furent délivrés dès la feste de lAscension, 4me du mois de may au d. an, par la libéralité du roy, qui donna la ville de Damiette pour rançon avec, et consentit outre de payer dix cents mille bezans dor, dont les Sarrazins rabattirent deux cents mille ; ce qui sapprend du sire de Joinville present et de la lettre que Saint-Louys escrivit aux Etats de son royaume de captione et liberatione sua, ce qui revient à deux millions sept cents mille livres de la monnoye daujourd hui. Après quoi, le duc Pierre et les seigneirs bretons et autres partirent incontinent pour sen revenir en France, où le seigneur de Châteaubriant estant de retour, fonda le d. couvent ou ministrerie (1).
Ce seigneur leur donna seulement, pour la subsistance de cinq religieux et un novice et pour le bastir, la somme de 200 livres de rente annuelle, qui se paye encore à présent : ce qui faisoit un gros revenu pour lors et qui est peu de chose à présent. Ils seroient grands seigneurs si il leur eust donné ces 200 livres de rentes en terres ; doù il se voit quils sont redevables des biens quils possèdent, à la charité des fidèles, qui les leur ont donné la plus part avec obligation de prières et de quelques messes par semaine, pour le salut de leurs âmes ; il sen voyait autre fois une liste dans leur sacristie.
Ce couvent a esté sujet, dans nos jours, aux changements et vicissitudes qui narrivent que trop souvent dans les maisons religieuses, car lordre des Mathurins estant tombé dans le relaschement par les deréglements de ses enfants, ainsi que la plus part des autres ordres, le Saint-Père, qui veille particulièrement au bien spirituel de cette illustre portion de lEglise, noublia rien de ce qui estoit nécessaire pour rappeler les sujets de ce saint ordre à lobservance de leur règle et de leur institut. Il donna commission, pour cet effect, à de bons religieux du même ordre, du zèle des quels il se servit pour ce grand dessein. Les uns, tenant le millieu entre laustérité des deschaux et le relaschement des autres, par un bref dUrbain VIII, commencèrent par la réforme de la maison de Cerfroy, qui est le chef de lordre, et les autres, cest-à-dire les deschaux, par la Provence où ils sestablirent premièrement.
Les uns et les autres de ces réformés, ayant appris la mort du ministre du couvent de Châteaubriant, qui avait eu le même sort que les autres et pleinement informés du pitoyable estat de cette pauvre maison, pensèrent aussi tost à sy establir. Ceux de Cerfroy vinrent les premiers sy présenter, mais ils la trouvèrent si pauvre, si délabrée et si endebtée, que trois ou quatre pauvres religieux avoient bien de la peine à sy nourrir, encore failloit aller aux dimanches et festes jusquà près de deux lieües servir des chappelles et faire dire de petits enfants pour avoir de quoy vivre. Ils perdirent cur, et, craignant de ne pouvoir remettre cette maison, sen retournèrent sans rien faire.
Les deschaux vinrent ensuite et le Père DAneau, qui estoit le chef, y estant arrivé, sy establit, appuyé sur la divine Providence, qui nabandonne point les siens au besoin et qui ne paroist jamais avec plus déclat que quand les choses paroissent désespérées au jugement des hommes, et il ne fut pas trompé, car il ny fut longtemps, que faisant venir de Provence quelques saints religieux et recevant même quelques novices de son institut, il gagna par la vertu et le bon exemple le cur des gens de bien, qui eussent crû faire un crime de ne lassister pas en son dessein. Par leur assistance, il eut bien-tôst reparé ce qui estoit plus pressé, comme le réfectoire, le cloistre, le dortoir et léglise. Il fist même faire un grand tableau au maître autel, qui représentoit saint Jean de Matha et saint Félix de Valois à la fonteine, le cerf au millieu, lange au dessus avec les captifs, et, au hault, la Tres-Sainte-Trinité, avec le chur au derrière de cet autel. Entre tous, celuy qui les assista davantage, fut Monseigneur de Cospean, pour lors evesque de Nantes. Ce frand prélat, qui avoit le discernement très-fin, conceut tant destime du Père DAneau et de ses religieux, quil leur faisoit souvent lhonneur de venir les veoir, jusques là, quil passait quelques fois trois mois dans leur maison, vivant avec eux comme un de leurs frères. Mais cette grande amitié, dont il honoroit ce bon Père, fut cause dun nouveau changement et dans sa personne et dans la maison de Châteaubriant, car, ayant été transféré de levesché de Nantes à celuy de Lysieux, par Louys treize d heureuse mémoire, afin destre plus près de sa personne sacrée qui lavoit choisy pour le directeur de son âme, ce bon prélat qui avoit toute confiance dans le Père DAneau, voyant quil y avoit dans cette ville un couvent de son ordre où la réforme de Cerfroy estoit nouvellement establie, le fist eslire pour supérieur par les religieux ; ce qui lobligea de se chausser et de changer dhabit pour se rendre conforme à eux : grand exemple de changement et de linconstance des hommes, même les plus vertueux ! Il fut continué dans cette charge autant de temps que vescut Monseigneur de Cospean, par la mort duquel il mourut aussi à la supériorité, et on lappella bientost à Cerfroy ou il vécut depuis en simple remigieux et décéda dans une extrême vieillesse.
Mais si Monseigneur de Cospean causa du changement en la personne du Père DAneau, le faisant quitter la discale, il en apporta aussi à la maison de la Trinité de Châteaubriant, estant cause que la maison, aussi bien que presque touts les religieux, passa de la discalce à la réforme de Cerfroy. Car, tout aussi tôst que le Père DAneau fut à Lizieux, le vicaire général y envoya un supérieur avec quelques religieux, et ce, environ 1634 ou 35, leurs archives en doivent faire foy. Et peu à peu, réparant la maison, ils augmentèrent le nombre des d. religieux ; ils y mirent une estude de philosophie, et en firent une des jolies maisons et des plus nombreuses de leur province, aussi bien que des plus régulières. Et ce pendant, ils ne la possedèrent quenviron dix à douze ans, car le Père Nazarre Anroux, Parisien, lequel y avoit demeuré jeune prestre, trouvant cette maison à son goust, forma le dessein de sen faire ministre, non pas triennal, mais perpétuel. Pour cet effect, il sen vint à Châteaubriant où, ayant conferé de son intention avec le Père Bertin, ministre, et la Père Quentin, qui avoient inclination de demeurer en cette maison le reste de leurs jours, estant estayé deux, il brigua les voix des autres religieux quil obtint facilement, les trompant ainsi par ses belles paroles, car il estoit prédicateur eloquent, quoique de peu de fonds de doctrine. Il sen retourna et son election étant confirmée au chapitre, il remit la maison entre les mains du général et prist les provisions de luy.
A son retour, il se deffist peu à peu, sous divers prétextes, des réformes et des religieux qui navaient aucune connaissance de ce quil avoit fait, et retenant avec soy les Pères Bertin et Quentin, il remist la maison dans lordre, sy maintint malgré les efforts des Pères réformés et y demeura quelques 5 à 6 ans. Cétait peu, à la vérité, mais assez pour se rendre odieux, et endetter le couvent par ses chicanes et ses dépenses excessives. Ce qui luy donna la pensée den sortir et luy fist embrasser avec joye loccasion qui sen présenta. La ministrerie dEtampes venant à vacquer pendant un voyage quil fist à Paris, et voyant que Monseigneur Le Mercier la donnoit au Père Héron, avec lequel il avoit esté élevé à Fontainebleau, servant les messes aux religieux, il dist tant de merveilles de la maison de Châteaubriant, taisant les embarras où elle estoit, quil luy persuada de la prendre au lieu de celle dEtampes. Ce questant agréé du d. genéral, Anroux resta à Estampes, et Héron sen vint à Châteaubriant, où il travailla de son mieux au restablissement de cette maison et à lacquit de ses dettes, même à sa décoration. Ce fut luy qui fist faire ce jardin bas, entouré de ces baux canaux, et il y eust fait beaucoup de bien sil neust point esté transféré à Sarzau, en lisle de Rhuys, par M. le Général qui lui accordoit tout ce quil lui demandoit. Le Père Villette, Parisien, vint en suitte au ministériat de Dinan, où il estoit. A son decès, le Père Chrysostôme Lambot, de Rennes, et profès de Toulouse, succéda à Villette, et après la mort de Lambot, le P. Barthélemy Siméon Tocri, Tolozain, bachelier de Paris, et depuis docteur de la d. faculté, y fut envoyé par le Révérend Père Tessier, général. Il ny resta pas longtemps, parce que le Révérend Père général et successeur de Tessier, pour le bien et la gloire de son ordre, lui donna la ministerie dArras, et celle de Châteaubriant au Révérend Père Marie Tolozain, aussi profès de Toulouse, homme de vertu et de doctrine qui avoit esté son sécrétaire et de son prédécesseur, aussi bien que leur vicaire par plusieurs années dans le couvent royal de Fontainebleau, dont ils etoient tous deux ministres en même temps que generaux de lordre. Il avoit déjà, depuis peu, une ministerie près Chaalons, en Champagne, mais comme il aime cette communauté et quil y a toujours vécu, il a très-volontiers suivi les sentiments de son général qui aussi a jugé que ce couvent avoit besoin de son caractère. Il a fort bien commencé et est très-bien intentionné pour lavenir. Il a un religieux de conséquence et grand prédicateur, le P. Ponson, Parisien, et minoret dun petit monastère.
Ce prieuré de Saint-Michel-des-Monts fut fondé par Geoffroy troisiesme, baron de Châteaubriant, joignant son parc, au haust du fauxbourg, lan 1204. Ce prieuré estoit autrefois membre dépendant de labbaye de Montfort-en-Bretagne, et ne pouvoit, selon la fondation, estre possédé que par un chanoine régulier qui debvoit estre nommé par le baron du d. Châteaubriant au révérend abbé du d. Monfort qui en donnoit la collation ; ce qui sestoit maintenu jusques en 1505, comme il se voit par une présentation ou nomination faitte au d. abbé par Jean de Laval, frère de Guillaume, en voyage, religieux, en présence des sires de Beaufort, de la Rochegiffart et de Chamballan, signé Jean de Laval, et par Monseigneur Galcher, sécrétaire. Selon les termes de la d. fondation, le prieuré estoit autrefois conventuel, où le prieur avoit dautres religieux avec luy ; car il nest obligé quà prières et oraisons. Il y avoit au d. prieuré court des religieux, court du dehors, tous les lieux réguliers, comme chappitre, cuisine, réfectoire, dortoir où il y a encore et à présent trois chambres et un chur hault. Mais peut-estre que ce prieuré a perdu de ses anciens revenus, ce qui lempesche dy avoir plusieurs religieux. Il est maintenant en commande, et se présente comme un autre bénéfice à Mire Gabriel Bechenec, clerc tonsuré et prestre à présent, de même que par feu monsieur de Montmorency à escuyer Alexandre de Pampelume, gentilhomme de Champagne, et qui avoit auparavant esté page dans la maison, avec la collation de Monseigneur lévesque de Nantes, qui, depuis que loffice divin ne se fait plus dans le d. prieuré, oblige le prieur à deux messes par semaines pour les fondateurs.
Cette église a un clocher et trois autels, et sy voyait encore, il ny a pas longtemps, le tombeau du fondateur et de son épouze, sous une fausse châsse couverte dun drap noir, avec leurs figures, les quatre vertus cardinalles aux quatre coins, dont il sen voit encore deux, et de petits angelots portant les armes de Châteaubriant, et tout au-dessus la figure du sieur de Montaffilant à genoux, le tout de terre cuite.