Janvier 2023 : Cet ouvrage vient d'être réédité, en tirage à la demande. Il s'agit d'une nouvelle édition entièrement recomposée, identique à l'édition originale, et non d'un fac-similé de mauvaise qualité. L'ouvrage de 370 pages est disponible en grand format (18x25cm) en version brochée (couverture souple), en version reliée (couverture rigide), ou bien en 4 petits fascicules à prix étudié, reprenant chacun une des quatre grandes parties de l'ouvrage). Une version Kindle est également disponible.

L'objectif de cette réédition était uniquement de proposer une lecture plus facile et agréable, et pour cela, l'ouvrage a entièrement été remis en page. Pour aider le lecteur à actualiser ses connaissances, une bibliographie mise à jour a été ajouté.

Châteaubriant, baronnie, ville et paroisse



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Chapitre IV (suite)




Mais voici qui est encore plus plaisant. Le réglement permet aux villes et communautés d'enchérir concurremment avec les particuliers, et au cas qu'elles demeurent adjudicataires, elles doivent fournir un sujet au nom duquel il sera expédié des lettres au grand sceau, qui tiendront lieu de provision, sans que le pourvu puisse prendre aucun titre ni qualité, ni faire aucune fonction desdits offices. Pendant la vie du sujet présenté, les villes peuvent continuer d'élire en la manière ordinaire les officiers qui leur conviendront, et elles seront admises au paiement de l'annuel à son nom ; et après sa mort, elles donneront un nouvel homme, dans les délais ordinaires, au nom duquel on expédiera de nouvelles lettres.

Ainsi les villes étaient réduites à l'exercice clandestin de leurs priviléges séculaires, sous le couvert du premier venu !

C'était trop d'abaissement ! Aussi la boutique du sieur Leclerq ne prospéra point. On eut beau réduire les mises à prix et augmenter les gages des acquéreurs, rien n'y fit : la marchandise était décidément dépréciée. Il fallut songer à rembourser à Leclerq les avances qu'il avait faîtes. Pour y arriver, on força les villes à acheter ces offices qu'elles ne pouvaient payer que par une augmentation d'octrois. Chaque province fut tarifée : la Bretagne fut comprise pour une somme de six cent mille livres et Châteaubriant pour 1,186 livres.

Personne à Châteaubriant n'avait voulu acheter la mairie, et la ville, contente des services de M. du Chastelier, l'avait réélu à l'unanimité, en octobre 1733. Il continua l'exercice de sa charge jusqu'au 19 septembre 1737, jour où il donna sa démission. Il fallut songer à le remplacer d'office. Des lettres patentes, en date du 27 août, données par le roi, nommèrent le sieur André Boucher de la Goyère maire par commission : il était sénéchal, premier juge, magistrat civil et criminel de la baronnie.

Le 8 août 1740, le conseil se divisa en deux partis, au sujet de la députa-tion aux Etats de la province. La fraction la plus nombreuse s'opposait à ce que ce fût un juge qui fût nommé, parce que depuis longtemps les bourgeois, cédant leur tour, n'y avaient pas été. Les voix tombèrent sur M. Brossais, et M. Boucher, mortifié sans doute qu'on lui refusât un honneur qu'un long usage attribuait aux syndics, donna sa démission.

II fut remplacé par M. Dutreil-Bernard père, avocat à la cour et lieutenant honoraire de la maîtrise de Châteaubriant.

Ici, malheureusement, des registres perdus nous donnent une interruption de trois ans et demi dans les affaires de la ville, c'est-à-dire du 28 avril 1744 au 30 mai 1748.

A cette époque, une délibération nous apprend que M. Yrou de la Buffrais, déjà pourvu de la charge de maire par commission du roi, est élu à l'unanimité des suffrages.

La liberté de l'élection n'existait guère, comme on peut bien le croire ; la communauté était priée, non de choisir, mais de ratifier la volonté royale.

Cependant, en 1751, les offices municipaux, qui n'avaient pas été vendus depuis l'édit de 1733, ayant été réunis au corps de ville, la communauté nomma, dans son scrutin, M. Dubreil du Châtelier, alors procureur fiscal, pour son maire, et M. Beaulac le Bastard, avocat, pour son syndic.

La charge de maire était devenue vacante par la mort de M. Yrou de la Buffrais.

Le 4 mai 1759, M. du Châtelier étant mort, la communauté élut à sa place M. de Fermon des Chapelières, alloué de la baronnie.v

En 1760, M. Ernoul de la Chénelière paraît avec le titre de subdélégué de Mgr l'intendant. Ce titre répondait à celui de nos sous-préfets actuels.

Nous arrivons encore à une nouvelle interruption des délibérations de la communauté. Quatre années font défaut, depuis le 17 mai 1763 jusqu'au 10 mars 1767.

A propos de la tenue des États qui devait avoir lieu à Saint-Brieuc le 12 décembre 1768, il s'éleva un nouveau conflit entre le maire et la communauté; celle-ci prétendit avoir la liberté d'élire au scrutin un député de son choix, tandis que le maire prétendait que par l'édit royal de 1748, il était député-né, en vertu de sa charge. La communauté s'entêta et élut M. Luette de la Pilorgerie, son syndic, à qui, dit-elle, elle accorde toute sa confiance. Mais l'intendant lui écrivit qu'elle était dans son tort et que c'était, le maire qu'elle devait députer ; ce qu'elle fut obligée de faire. Ces tracasseries engagèrent M. de Fermon à donner sa démission ; il quitta la mairie au 13 mars 1769.

Toutes les formes d'élection à cette magistrature n'étaient pas épuisées, comme on va le voir. Le 21 août de la même année, on obligea la communauté à présenter cinq sujets à Mgr l'intendant pour concourir à ladite charge.

C'étaient MM. Maujouan, Luette, Cotelle, Ernoul de la Chénelière et Hochedé de la Pinçonnais. Les trois premiers furent élagués par l'intendant; M. de la Pinçonnais offrit sa démission de concurrent. Il ne restait plus que M. de la Chénelière, qui fut nommé et qui accepta.

Il était élu pour trois ans. A ce terme, nous retrouvons une nouvelle forme administrative : le duc de Penthièvre est gouverneur de Bretagne et la ville a presque recouvré ses anciennes franchises. En effet, trois sujets sont proposés au gouverneur : MM. Luette de la Pilorgerie, Poulain de la Furetière, avocat, maître des eaux et forêts, et Bernard de la Largère, avocat. Les sujets ayant été agréés, la ville élut dans ses scrutins : 1° un maire, qui fut M. de la Pilorgerie ; 2° un syndic, M. Guérin, qui exerçait déjà cette charge ; 3° douze échevins; le tout sous la ratification de Mgr le duc de Penthièvre (26 juillet 1773).

Le retour à la liberté des élections municipales fut complet à la mort de Louis XV. On eût dit que la rougeur commençait à monter au front des gouvernants sur l'ignominie de leurs agissements passés. Le 6 juillet 1776, tous les habitants, dûment convoqués, se réunirent pour procéder au choix de leurs administrateurs. L'élection se fît à la pique (1) [2]. M. Maujouan-Dugasset ayant obtenu 147 piques, fut proclamé maire; M. Bernard de la Tertrais père, syndic, et de plus douze échevins.

Ce premier élu du peuple ne demeura en charge que jusqu'au mois d'octobre 1778. Il donna sa démission et fut remplacé par M. Fresnais de Lévin, auquel on donna M. Cathelinais de la Mostière pour syndic.

Il est évident que de tous côtés et dans toutes les classes, le besoin de libertés plus complètes se faisait sentir. Le peuple était accouru avec empressèment au scrutin, et bientôt on ne fat plus libre d'en écarter tous ceux qui se présentaient indifféremment. Une lettre de l'intendant (13 mai 1781) signale à la communauté les abus qui se glissaient dans ses élections, et lui enjoint de n'admettre à voter que les particuliers âgés de 25 ans et qui sont chefs de maison dans cette ville.

M. Fresnais, ayant eu quelques désagréments avec son conseil, donna sa démission (16 septembre 1782). Il fut remplacé par M. Vissault des Penthières. M. Dubois lui fut adjoint pour syndic. — M. Vissault tint peu de temps la mairie ; le 31 juillet 1785, il était démissionnaire. Il y a tout lieu de croire que les dissensions survenues entre la communauté et les officiers de la jurisdiction seigneuriale en furent cause. Nous aurons occasion d'en parler plus longuement ailleurs. Il eut pour successeur M. Brossais de Bouvrinais, élu à la pique, comme précédemment, avec son syndic, M. Guibourg. Les douze échevins étaient ainsi répartis : deux dans la noblesse; deux dans le clergé ; deux parmi les avocats ; deux parmi les procureurs, et deux parmi les marchands.

27 août 1787. - Ici nous copions textuellement le registre municipal : « Une mort prématurée vint enlever à la ville M. Brossais. Il avait toujours rempli avec zèle et discernement les obligations de la place qu'il devait à la confiance publique. Il savait qu'il est beau de voir un officier municipal honorer son état, s'en tenir honoré, et concourir à la tranquillité et au bonheur de ses concitoyens. Son esprit, ses talents et ses vertus, semblaient lui promettre une carrière glorieuse ; nous n'avions qu'à désirer qu'elle fût plus longue, mais si la mort nous prive, avant le temps, d'un maire si digne de nos regrets, tâchons de remédier à. notre perte en en choisissant un. autre digne de lui succéder.

» Il serait juste, ajouta ensuite le syndic, de donner à cet homme éminent des marques publiques de notre reconnaissance, et d'ordonner que ses obsèques soient faites aux frais du public. »

Et la communauté adopta la proposition d'une voix unanime.

On aime à faire connaître de pareils sentiments et à transmettre à l'admiration et à la reconnaissance de la postérité des noms qui se sont ainsi honorés !

Sur les trois candidats proposés et agréés, M. Louard, président des traites, fut celui que le choix du peuple appela à succéder à M. Brossais.

Nous pouvons considérer comme terminée cette période que nous appelons féodale. M. Brossais clôt dignement la liste des magistrats qui pendant deux, cents ans veillèrent aux intérêts de la cité.







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